L’effet placebo
De nombreuses études menées depuis une cinquantaine d’années sur l’effet placebo ont mis en évidence les impacts somatiques de ce procédé et sa remarquable efficacité dans le traitement de la dépression, mais aussi des affections cardiaques, urinaires ou respiratoires graves. Tout permet de penser qu’il existe un substrat biochimique à l’effet placebo et que l’organisme répond autant au contenu symbolique d’un traitement qu’à sa composition chimique.
Des recherches qui éclairent le rôle de l’esprit dans les processus de guérison.
L’effet placebo sert d’échelle pour évaluer l’efficacité des nouveaux médicaments, mais son rôle dans la médecine occidentale se limite-t-il à cela ? En quoi consiste-t-il exactement ? Les professionnels de santé se sont souvent emparés de l’effet placebo pour désigner ce qu’ils considéraient comme une escroquerie, et les thérapies alternatives ont fréquemment été décrites comme de simples placebos. Pourtant, il s’agit bien d’un phénomène spontané, authentique et réel qui induit des guérisons ou des améliorations manifestes, mais aléatoires survenant en l’absence de toute substance chimique ou pharmacologique active. Des médicaments factices ne contenant aucune substance chimique active peuvent ainsi agir comme de véritables médicaments et produire des effets thérapeutiques chez les patients auxquels ils sont administrés.
Les essais pharmaceutiques ont souvent montré aux fabricants que leur médicament ne produisait pas davantage d’effets qu’un placebo. Mais cela ne signifie pas pour autant qu’un placebo équivaut à une absence totale de réaction de l’organisme humain. Au contraire, un placebo indique l’existence de stimuli non chimiques qui incitent fortement l’organisme à suivre la voie de la guérison. Autrement dit, l’effet placebo repose non pas sur l’efficacité d’une molécule, mais sur l’intention thérapeutique et l’attente du patient.
Effet indésirable ou nocebo
On a souvent réduit l’effet placebo à un phénomène purement psychologique et hautement subjectif. Le patient, convaincu de l’efficacité de la thérapie, fait abstraction de ses symptômes ou les perçoit à peine, sans que sa santé s’améliore de façon notable ; en d’autres termes, le patient se sent mieux, mais il ne va pas mieux. Cependant, l’aspect psychologique subjectif de l’effet placebo peut-il expliquer toutes ses propriétés thérapeutiques ? La réponse est catégorique : il s’agit d’un mécanisme curatif alternatif propre à l’entité humaine et déclenché par l’intention thérapeutique ou la croyance dans le potentiel thérapeutique d’un traitement qui implique des réponses biochimiques et des réactions au stimulus de l’intention thérapeutique ou de la croyance.
Mais les placebos ne sont pas toujours bénéfiques et peuvent même produire des effets néfastes. Par exemple, administrer une substance pharmacologiquement inactive à des patients peut parfois entraîner une détérioration inattendue de leur santé. Un examen de cent neuf essais en double aveugle a révélé que 19 % des receveurs de placebo 7 avaient présenté un effet nocebo, soit une détérioration inattendue de leur état de santé.
Dans une expérience connexe, des chercheurs ont fait croire à des volontaires qu’un faible courant électrique allait passer dans leur tête ; bien qu’il n’y ait pas eu le moindre courant, 70 % des sujets (étudiants en médecine) se sont plaints de maux de tête après l’expérience.
La pensée positive ou négative apparaît comme un facteur de risque décisif pour chaque traitement, peut-être encore plus important qu’une intervention médicale.
L’effet nocebo semble avoir un substrat biologique spécifique. Un groupe de quinze hommes dont les femmes souffraient d’un cancer en phase terminale a participé à une petite étude prospective. Après le décès de leurs épouses, leur chagrin a provoqué une immunodépression et leurs lymphocytes n’ont plus réagi que faiblement aux mitogènes. L’étude a suggéré que cette immunodépression avait entraîné une hausse de la mortalité dans le groupe en question.
Efficace contre la dépression
Le terme placebo (« je plairai » en latin) apparaît dès le Moyen Âge dans l’expression Placebo Domino (« je plairai au Seigneur ») tirée d’une traduction biblique du cinquième siècle ap. J.-C. Au XVIIIe siècle, le terme a été adopté par la médecine pour désigner les préparations sans la moindre valeur thérapeutique administrées à des patients en guise de « leurres ». Le terme a commencé à se transformer en 1920 et, après diverses étapes, a pris son sens actuel en 1955 lorsqu’on lui a prêté une part importante de l’effet thérapeutique en général. Dans son article de 1955 intitulé « The Powerful Placebo », Henry K. Beecher a attribué environ 30 % du bénéfice thérapeutique général à l’effet placebo. Dans certaines études ultérieures, ce pourcentage a même été estimé à 60 %. Dans un récent examen de trente-neuf études concernant l’efficacité des antidépresseurs, le psychologue Guy Sapirstein a conclu que 50 % des bénéfices thérapeutiques venaient de l’effet placebo, avec un petit pourcentage de seulement 27 % attribué à l’action du médicament (en l’occurrence Fluoxétine, Sertaline et Paroxétine). Trois ans plus tard, avec son confrère psychologue Irving Kirsch, Sapirstein a traité les données issues de dix-neuf essais en double aveugle sur la dépression et a constaté que les résultats thérapeutiques attribués à l’effet placebo atteignaient un pourcentage encore plus élevé : 75 % des guérisons ou améliorations de la dépression étaient dues à un placebo » !
Deux placebos valent mieux qu’un
Hróbjartsson et Gøtzsche (en 2001 et en 2004) doutaient de l’efficacité du phénomène placebo, l’attribuant uniquement aux facteurs subjectifs de la psychologie humaine, ce qui est vrai dans une certaine mesure. Deux études, au cours desquelles on a administré aux sujets exclusivement des placebos, ont montré que leur effet était influencé par la perception qu’avait le sujet de la thérapie en question. On constatait alors que deux comprimés placebo valaient mieux qu’un seul, que les gros comprimés valaient mieux que les petits et que les injections constituaient le summum.
Le placebo provoquait une réaction non seulement à la thérapie mais aussi sa forme, ce qui laisse penser que le phénomène placebo se façonne selon l’univers symbolique personnel du patient. Avant que la réaction au placebo ne se produise, la perception humaine a déjà interprété la thérapie appliquée et y a préparé une certaine réponse. Il semblerait que des stimuli chimiques, mais aussi non chimiques, contribuent à inciter l’organisme humain à suivre la voie de la guérison.
Mais la réaction au placebo consiste-t-elle en un simple phénomène psychologique ou présente-t-elle d’autres effets somatiques tangibles ?
L’exemple du Krebiozen
L’un des faits les plus spectaculaires concernant la thérapie placebo date de 1957, alors qu’un nouveau médicament miracle, le Krebiozen, promettait de résoudre définitivement le problème du cancer. Un patient présentant des tumeurs métastatiques et de l’eau dans les poumons, ce qui nécessitait une prise quotidienne d’oxygène et le port d’un masque à oxygène, avait entendu parler du Krebiozen. Son médecin participant aux recherches sur ce médicament révolutionnaire, le patient le supplia de lui en administrer. Le médecin s’exécuta et constata la guérison miraculeuse de son patient : ses tumeurs s’étaient dissoutes et il put reprendre une vie quasi normale. La rémission fut de courte durée : lorsque le patient tomba sur des articles exposant que le Krebiozen n’était pas à la hauteur des espérances en matière de cancérothérapie, il fit une rechute et ses tumeurs réapparurent. Profondément troublé par cette aggravation, le médecin eut recours à une ruse désespérée : il proposa à son patient une nouvelle version améliorée du Krebiozen, qui n’était en réalité que de l’eau distillée. Le patient guérit complètement après le traitement placebo et resta en forme pendant deux mois… jusqu’à ce que le verdict final sur le Krebiozen soit publié dans la presse : totalement inefficace. Ce fut le coup de grâce pour le patient, qui mourut quelques jours plus tard.
Les placebos sont des fantômes qui hantent notre royaume d’objectivité biomédicale et révèlent les paradoxes et les fissures de ce que nous avons défini comme étant les facteurs réels et actifs d’un traitement.
Des études édifiantes
Aussi édifiante que soit cette histoire de Krebiozen, aucun cas isolé ni témoignage personnel ne peut prétendre valider une thérapie. Ce sont aux études statistiques de vérifier l’efficacité d’une thérapie, et des études bien conçues peuvent s’accorder à reconnaître que le phénomène placebo a des propriétés somatiques.
Une étude de ce genre a été lancée en 1997. Les deux groupes de l’étude étaient formés de patients souffrant d’hypertrophie bénigne de la prostate. L’un d’entre eux a pris la véritable médication, tandis que le groupe témoin recevait un traitement placebo. Les patients du groupe témoin ont fait état d’un soulagement de leurs symptômes et même d’une amélioration de leurs fonctions urinaires. Un placebo aurait également agi comme un bronchodilatateur chez des patients asthmatiques ou aurait eu l’action parfaitement opposée (dépression respiratoire), selon la description de l’effet pharmacologique donnée aux patients par les chercheurs, et donc l’effet attendu par les patients.
Contre les allergies alimentaires
Un placebo s’est révélé hautement efficace contre les allergies alimentaires et, par la suite, incroyablement efficace dans l’effondrement du cours des biotechnologies sur le marché financier. Comment est-ce possible ? Peptide Therapeutics Group, une société de biotechnologies, se préparait à lancer sur le marché un nouveau vaccin contre les allergies alimentaires. Les premiers rapports étaient encourageants. Lorsque le vaccin expérimental a atteint le stade des essais cliniques, le porte-parole de la société annonçait 75 % de réussite, pourcentage qui suffit généralement à prouver l’efficacité d’un médicament. On devait rapidement déchanter… Le groupe témoin, qui avait reçu un placebo, a fait presque aussi bien : sept patients sur dix ont déclaré s’être débarrassés de leurs allergies alimentaires. La valeur des actions de la société a chuté de 33 % ! Ainsi, l’effet placebo sur les allergies alimentaires a eu un effet nocebo sur le marché financier. Dans un autre cas, un médicament pour le cœur produit par génie génétique, en qui Genentech avait mis de grands espoirs, a été discrédité par un placebo.
Comme le dit fort justement l’historienne scientifique Anne Harrington, les placebos sont « des fantômes qui hantent notre royaume d’objectivité biomédicale et révèlent les paradoxes et les fissures de ce que nous avons défini comme étant les facteurs réels et actifs d’un traitement ».
L’effet placebo en chirurgie
Mais jusqu’où l’effet placebo peut-il s’immiscer dans le domaine bien défini de la médecine ? Il ne peut tout de même pas rivaliser avec sa force de frappe et défier la chirurgie. À moins que…
En 1939, un chirurgien italien dénommé Davide Fieschi a inventé une nouvelle technique pour traiter l’angine de poitrine. Pensant qu’une meilleure irrigation sanguine du cœur réduirait la douleur de ses patients, il a pratiqué de minuscules incisions dans leur cage thoracique et a ligaturé les deux artères mammaires internes. Les trois quarts des patients ont montré une amélioration ; un quart a été guéri. L’intervention chirurgicale est devenue la méthode classique de traitement de l’angine de poitrine durant les vingt années suivantes. Mais en 1959, un jeune cardiologue, Leonard Cobb, a mis la méthode Fieschi à l’épreuve. Il a opéré dix-sept patients : sur huit d’entre eux il a suivi la méthode classique ; sur les neuf autres, il s’est contenté de pratiquer les minuscules incisions, laissant les patients croire qu’ils avaient subi l’intervention complète. Le résultat a été réellement renversant : ceux ayant subi l’opération factice ont eu d’aussi bons résultats que ceux ayant subi l’intervention complète ! Cela a marqué la fin de la technique Fieschi et le début de l’effet placebo documenté en chirurgie. En 1994, le chirurgien J. Bruce Moseley a expérimenté le placebo en chirurgie. Il a divisé un petit groupe de patients souffrant d’ostéoarthrite du genou en deux groupes égaux. On a dit aux deux groupes qu’ils allaient subir une chirurgie arthroscopique, mais seul le premier groupe l’a réellement subie. L’autre a été laissé pratiquement sans traitement, le médecin se contentant de pratiquer de minuscules incisions pour rendre le scénario de l’arthroscopie crédible. Des résultats similaires ont été rapportés dans les deux groupes.
Stupéfait par le résultat, Moseley a décidé d’effectuer l’essai avec un plus large échantillon statistique afin de parvenir à des conclusions plus sûres. Les résultats ont été les mêmes : la chirurgie arthroscopique était thérapeutiquement équivalente à l’effet placebo ! Le placebo avait fait son entrée au bloc opératoire ! L’aspect le plus impressionnant du placebo en chirurgie est peut-être apparu dans une étude révolutionnaire de 2004. Dans le domaine novateur de la recherche sur les cellules souches, on a choisi d’aborder la maladie de Parkinson sous un nouvel angle. Des neurones dopaminergiques d’embryon humain ont été implantés par de petits trous dans le cerveau des patients. Une fois encore, les résultats étaient encourageants… et une fois encore, l’intervention n’a pas fait mieux qu’un placebo. Dans ce cas, le placebo consistait à pratiquer de petites incisions dans le crâne sans implanter de cellules souches. Comme l’ont avoué les chercheurs, « l’effet placebo était très fort dans cette étude ». Mais comment se fait-il que l’attente thérapeutique seule produise souvent des résultats équivalents à ceux de la véritable chirurgie ? Il semble que l’esprit exerce un contrôle sur certains processus somatiques, y compris les maladies. On commence tout juste à entrevoir les traces biochimiques de cette influence. La recherche moderne révèle l’existence d’un substrat biologique tangible à l’effet placebo.
Les voies somatiques
Au milieu des années 90, le chercheur Fabrizio Benedetti a réalisé une nouvelle expérience consistant à provoquer une douleur ischémique puis à la soulager par l’administration de morphine. Lorsque la morphine a été remplacée par une solution saline, le placebo a présenté des propriétés analgésiques. Toutefois, lorsque de la Naloxone (un antagoniste opiacé) a été ajoutée à la solution saline, les propriétés analgésiques de l’eau ont été neutralisées. Benedetti en a conclu que les propriétés analgésiques du placebo résultaient de voies biochimiques spécifiques. La Naloxone inhibait non seulement la morphine, mais aussi les opioïdes endogènes (les analgésiques).
Les opioïdes endogènes, ou endorphines, ont été découvertes en 1974 et agissent comme des anti-douleurs. La suggestion de Benedetti d’une libération d’endorphines induite par le placebo a été étayée par les résultats obtenus avec des examens IRM et tomographies par émission de positrons. La libération d’endorphines induite par un placebo affecte également le rythme cardiaque et l’activité respiratoire.
Comme l’a expliqué le chercheur Jon-Kar Zubieta, « … cette conclusion porte un autre coup dur à l’idée que l’effet placebo est un phénomène purement psychologique et non physique. »
D’autres conclusions étayent la thèse selon laquelle l’effet placebo présente un substrat biochimique tant dans la dépression que dans la maladie de Parkinson. Après avoir analysé les résultats des tomographies par émission de positrons, les chercheurs ont évalué le métabolisme du glucose dans le cerveau des patients dépressifs. Le métabolisme du glucose sous placebo présentait des différenciations similaires à celles provoquées par les antidépresseurs tels que la Fluoxétine. Chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, une injection placebo favorisait une sécrétion de dopamine similaire à celle provoquée par l’administration d’amphétamines. Benedetti a démontré que l’effet placebo réduisait l’activité des neurones individuels du noyau subthalamique chez les patients atteints de la maladie de Parkinson.
Liens avec la perception
Au vu de nombreux résultats de recherche, il est logique et assez peu risqué de conclure qu’il existe un substrat biochimique à l’effet placebo. Mais le plus fascinant est son lien avec la perception. Il semblerait que la perception ainsi que les codes et symboles que l’ordinateur vivant (le cerveau) utilise pour traiter les informations internes et externes déterminent fortement la puissance et la forme de la réponse placebo.
Dans une étude récente, on a fait croire aux patients qu’ils avaient été infectés par des bacilles dangereux et on leur a administré un traitement. Toutefois, il n’y avait aucun bacille et le traitement administré était un placebo. Vous devinez la suite ? Certains sujets de l’étude ont développé des troubles de type infectieux qui n’étaient pas traitables par la médicamentation placebo. L’esprit avait interprété les bacilles fictifs comme dangereux et ordonné au corps d’y réagir comme s’ils étaient réels. Malgré la puissance du placebo et son importance pour une nouvelle perception de la santé marquée par une forte interaction entre le corps et l’esprit, un grand nombre de scientifiques continuent à considérer le placebo comme une erreur systématique insignifiante, un épiphénomène gênant. Selon le chercheur en cancérologie Gershom Zajicek : « Il n’y a rien dans la théorie pharmacocinétique qui explique l’effet placebo. Afin de conserver la cohérence de la théorie, l’effet placebo est considéré comme une erreur aléatoire ou un bruit négligeable. » L’un des chercheurs en placebo les plus intuitifs a été Stewart Wolf, « le père de la médecine psychosomatique », qui dès 1949 en avait donné une description détaillée. Wolf a non seulement défendu le placebo, le qualifiant de phénomène non fictif et bien « réel », mais en a également décrit le comportement pharmacomimétique. C’est peut-être le premier chercheur à avoir mis l’effet placebo en corrélation avec la psychologie et la prédisposition mais également avec la perception. Il y a plus d’un demi-siècle, il a affirmé que « les mécanismes du corps sont capables de réagir non seulement à une stimulation physique et chimique directe mais aussi à des événements, à des mots et à des stimuli symboliques ayant acquis on ne sait trop comment une signification spéciale pour l’individu ».
Un symbole thérapeutique
Dans ce contexte, un comprimé n’est pas simplement une substance active, c’est aussi un symbole thérapeutique ; l’organisme est donc capable de réagir non seulement à son contenu chimique mais aussi à son contenu symbolique. De même, au-delà de ses propriétés physiques, un bacille acquiert des propriétés symboliques qui peuvent faire réagir l’organisme même en l’absence de ce bacille.
L’existence et l’ampleur de l’effet nocebo devraient également être étudiées dans le cadre de la pharmacorésistance, phénomène multifactoriel impliquant non seulement une capacité d’évolution des microbes, mais aussi des mécanismes psychiques humains. Les phénomènes placebo et nocebo pourraient se révéler fondamentaux non seulement sur le plan personnel mais également dans le domaine de la santé publique.
Ils pourraient même constituer la pierre d’angle d’un nouveau modèle de santé, d’une nouvelle médecine imaginée par Wolf dans les années 50 : « … à l’avenir, les médicaments seront évalués en fonction non seulement de leur action pharmacologique, mais aussi des autres forces entrant en jeu et des circonstances entourant leur administration ».
Il y a cinq siècles, l’alchimiste et médecin suisse Paracelse (1493-1541) écrivait : « Vous devez savoir que la volonté est un puissant adjuvant de la médecine ». Il semble que notre arrogance scientifique nous ait rendus aveugles aux enseignements du passé.
D’AUTRES CAS SIGNIFICATIFS
Magie rétroactive
Alors qu’il était au Congo, en 1682, le missionnaire italien Jerome Merolla da Sorrento entendit conter une curieuse histoire illustrant les conséquences parfois mortelles de la crainte superstitieuse. Au cours d’un voyage, un jeune noir passa la nuit chez un ami qui, au matin, lui prépara une poule sauvage pour son déjeuner. Or, c’était là un mets qu’un tabou tribal inviolable interdisait aux jeunes gens. Le voyageur demanda à son ami s’il ne lui servait pas de la poule sauvage. L’autre lui affirma que non, et le jeune homme mangea de bon appétit.
Quelques années plus tard, les deux hommes s’étant de nouveau rencontrés, l’ami demanda à son invité de naguère s’il serait capable de manger de la poule sauvage. « Certainement pas », répondit l’autre, un sorcier le lui avait solennellement interdit. L’ami se mit à rire. Pourquoi non maintenant, alors qu’il s’en était si bien trouvé quand lui-même lui en avait servi ? En apprenant la vérité sur le repas préparé par son ami, le jeune homme se mit à trembler… et il mourut dans les vingt-quatre heures. (American Anthropologist, avril-juin 1942.)
Eau bénite
Joe Riker, de New Haven (Connecticut), refusa de se faire opérer en 1974 d’un cancer qui avait percé un trou dans son crâne et mettait à nu son cerveau.
« Vous allez avoir une méningite, fit le chirurgien qui pansait la blessure chaque semaine. Cette chose est en train de vous ronger le cerveau.
Pas d’opération, » répondit Joe.
Un mois passa sans que Joe vienne se faire panser. Inquiet, le chirurgien qui le traitait alla dîner dans l’établissement où son patient était cuisinier.
Joe était derrière le comptoir, portant son calot comme d’habitude. Il accepta de consulter le chirurgien l’après-midi même.
Quand il arriva, il retira son chapeau et inclina la tête : un pont fragile de peau neuve recouvrait à présent le trou de son crâne.
« Qu’est-il arrivé ? demanda le chirurgien.
– À propos de ça ? » Joe désignait le sommet de sa tête. « Oh, dit-il, la sœur de ma femme est allée en France et m’a rapporté une bouteille d’eau de Lourdes. Je l’ai lavé avec, tout un mois. » (Harper’s, janvier 1976.)
Pas que les humains…
Dans le livre Le Mystère du placebo (Odile Jacob, 1996), Patrick Lemoine cite un cas tiré de la pratique vétérinaire. « Que fait un praticien si certaines génisses rétives refusent de donner leur lait lors des premières traites ? Il leur injecte de l’ocytocine, hormone qui déclenche l’expulsion du liquide. Au bout de deux ou trois injections, il suffit de légèrement piquer l’animal du bout de l’aiguille pour obtenir un résultat identique. De l’importance de la psychologie de l’environnement et du conditionnement chez les ruminants ?
Traduction : Christèle Guinot
Avec l’aimable autorisation de la revue Nexus
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