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À propos du livre “Les intelligences particulières” de Grégory Delaplace

« Il y a deux façons d’être dupe. L’une est de croire ce qui n’est pas vrai, l’autre est de refuser de croire ce qui est vrai. »

Süren Kierkegaard

D’emblée, je tenais à remercier Philippe Lacaze de m’avoir fait découvrir Grégory Delaplace.

En effet, j’ai connu le travail de l’anthropologue par l’intermédiaire de Philippe qui a le même intérêt que moi pour l’investigation des anomalies et la recherche en parapsychologie. Philippe ne tarissait pas d’éloges au sujet de Delaplace. Je me souviens qu’il me disait « va le voir ! Assiste à l’une de ses conférences, je suis sûr que tu vas accrocher ! » J’aurai bien voulu le voir mais mon travail de chef de service éducatif ne me le permettait pas à l’époque.

Je le regrette, car autant être clair dès le début de cette critique : Delaplace est à mon sens, l’un des meilleurs chercheurs sur la thématique des hantises. Il frappe juste, décoche des flèches plusieurs fois dans le mille et sa maitrise du sujet est impressionnante d’un point de vu anthropologique et ethnologique. Il est toujours rafraîchissant de voir des universitaires ramener du positif est de la nouveauté sur un sujet bien souvent malmené par des « je-sais-tout » qui se prétendent experts dont l’arrogance est proportionnelle à un égo surdimensionné majoré par un bel effet Dunning-Kruger…

Dans cet écrit, au-delà d’une analyse succincte du contenu du livre qui se suffit à lui-même, je développerai en quoi l’approche de Delaplace m’a interpellé dans le cadre de mes investigations et de ma compréhension des hantises, notamment dans le 3echapitre. Loin de faire ma propre promotion dans la dernière partie de cette critique, je remercie l’auteur de m’avoir apporté de nouvelles idées, de nouveaux apports et au sens plus large, de pousser l’analyse plus loin.

Présentation de l’éditeur

Le livre de Grégory Delaplace est édité aux éditions « vues de l’esprit » qui a pour ambition d’aborder les expériences singulières par le prisme des sciences sociales et d’y prêter la plus grande attention. Les éditions « vues de l’esprit » proposent ainsi une vision ouverte et rigoureuse des anomalies.

« La réalité s’arrêterait-elle à nos perceptions ? N’y aurait-il aucune expérience possible au-delà de celles qu’offre le monde matériel ? Si certaines intelligences particulières perçoivent des phénomènes subtils, parfois jugés extraordinaires, il vaudrait peut-être la peine de leur prêter attention. Et qui sait, à partir de ce fil, quelle pelote nous déroulerons, jusqu’où ce fil nous mènera, ce qu’il nous aura fait voir — et quelles formes de vie en découleraient.

Entre les sciences modernes qui tentent de percer les énigmes de la matière et, plus récemment, de la conscience, et les géographies célestes que dessinent les théologies, les « sciences humaines » pourraient aussi avoir leur mot à dire.[1] ».

Vues de l’esprit

Quelques mots sur l’auteur

Grégory Delaplace est anthropologue. Il est également directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études et également membre du GRSL (Groupe, Sociétés, Religions, Laïcités) qui est un laboratoire de recherches du CNRS qui regroupe plusieurs chercheurs de diverses compétences académiques.

Spécialiste en anthropologie sociale de la culture Mongole et en éthographie, Delaplace est un chercheur qui se concentre sur une anthropologie de l’invisible qui côtoie les vivants.

« Que se passe-t-il lorsque les morts apparaissent, lorsque les fantômes se manifestent ? Par-delà la diversité des contextes, des époques et des approches adoptées, il s’agit ici d’envisager les fantômes non seulement comme des choses auxquelles on croit (ou non), mais aussi et surtout comme des choses qui arrivent, comme des événements. Par les institutions qu’ils mettent en branle, les doutes qu’ils occasionnent ou les solutions auxquelles ils donnent lieu, ces événements activent les solidarités, ravivent les conflits et tracent le contour des collectifs ; en un mot, ils contraignent les vivants à recomposer leur monde.

Documenter une apparition invite non seulement à se demander ce qui apparaît – à décrire la forme que peuvent prendre les fantômes à travers le monde – mais aussi ce que les apparitions font apparaître – ce qu’un fantôme rend visible lors de son surgissement »[2].

Grégory Delaplace, Les fantômes sont des choses qui arrivent, surgissement des morts et apparitions spectrales (revue « Terrain » consacrée aux fantômes, anthropologie et sciences humaines, avril 2018).

De ma lecture, le livre les « intelligences particulières » est la suite logique des recherches de Delaplace sur le sujet. En 2018, L’auteur avait déjà esquissé les contours de sa réflexion sur le sujet. Pour reprendre ses propos « les fantômes sont des choses qui arrivent » et s’imposent aux vivants. Peu importent les mots et les maux qui tentent de rendre compte de cette expérience, les fantômes, les poltergeists et aux sens plus large, les maisons hantées, sont des évènements singuliers.

L’ouvrage

Le livre est très documenté, sourcé et se compose de 250 pages. Dès les premiers paragraphes, le lecteur se rend compte du gage de sérieux de l’auteur. Le recueil des notes compte à lui seul plus de 30 pages.

La plume de Delaplace est préfacée par Vinciane Despret[3], philosophe des sciences et psychologue qui s’intéresse également aux liens que gardent les vivants avec leurs défunts. Pour la chercheuse, les personnes qui entretiennent un lien avec leurs disparus ne sont pas irrationnelles. Au contraire, elles approfondissent les contours de la rationalité, l’évaluent et la questionnent.

Au-delà de la dissonance cognitive que de telles expériences universelles apportent à ceux qui en font l’expérience et des chercheurs qui les étudient, il est bel et bien question du rapport à la rationalité qui est réévalué lors d’un tel évènement.

Certains « chercheurs » en psychologie et autres auteurs prétendent encore que de telles expériences ne sont que des biais et que la croyance en ces phénomènes se résume à, je cite « une paresse intellectuelle et un déficit au niveau de la pensée analytique[4] » au mépris des autres travaux en psychologie qui les contredisent et des archives de la SPR. D’autres auteurs sceptiques comme David Robson qui se prennent pour des lumières, affirment que les gens qui ont des expériences fantomatiques sont enclins à la fantaisie… Quand je vois de telles affirmations fallacieuses et un tel ostracisme, je me demande toujours s’il faut rire ou pleurer face « aux bien-pensants » qui n’évoluent pas d’un pouce.

De mon point de vue, ce ne sont pas les déficits cognitifs qui sont à blâmer et la prétendue crédulité que l’on colle gratuitement sans esprit critique aux « croyants » mais plutôt les systèmes sociétaux qui incarnent, selon les cultures, des normes qui différent d’un pays à l’autre. Les expériences de hantises sont un parfait exemple de remise en cause de la conception de la réalité et de la conformité. Il n’est donc pas étonnant que certaines cultures les acceptent, les refoulent comme irrationnelles, pseudo-scientifiques ou encore, comme des tabous sociétaux alors que tout le monde en parle.

Même si les phénomènes « paranormaux » sont universels (Environ 2/3 de la population aux quatre coins du monde croit en de tels phénomènes selon les statistiques actuelles) il est raisonnable d’admettre que les anomalies ont toujours fait partie de l’histoire de l’homme et au sens plus large, du monde. Ces « événements » s’affranchissent des modèles communément admis. Ils ne régressent pas mais témoignent au contraire d’une remarquable adaptabilité à contourner les règles.

Dans son livre, Delaplace marque davantage son intérêt pour l’insaisissable. Ses différentes manifestations dans les différentes cultures, l’ont amené à approfondir la problématique des fantômes en investiguant les cas de hantises via la consultation des archives de la Society for Psychical Research qui se consacre depuis sa genèse à l’étude des anomalies ou extraordinaires que l’on appelle communément les phénomènes paranormaux.

Au fils des pages, Delaplace nous embarque dans un véritable polar, un thriller authentique qui prend place pendant l’après-guerre de la seconde guerre mondiale mené tambour battant par le jeune Donald West, enquêteur qui affiche un scepticisme déterminé au sein de la SPR et qui a investigué quelques dizaines de cas de manifestations spontanées[5].

Delaplace retient 3 cas investigués par West répartis en 3 chapitres. Tout au long des 3 chapitres, l’auteur développe la lecture des événements des témoins confrontés aux raisonnements circulaires de West « Je ne crois pas aux fantômes, donc les ménages se trompent ».

  • Le premier chapitre s’attarde à cerner l’événement de la hantise et du fantôme en se focalisant sur l’inquiétude particulière que génère cette expérience qui conduit le ménage à demander l’intervention de spécialistes.
  • Dans le second chapitre, la maison hantée est présentée comme un prisme, un lieu de savoir dont les spécialistes ont des lectures différentes : spirites, parapsychologiques et psychologiques.
  • Le troisième chapitre se focalise sur la dynamique particulière d’un ménage et d’un lieu qui vont se faire résonance et créer la dynamique particulière d’une hantise.

« Pour voir il faut croire ! » Une affirmation particulièrement moisie

Contrairement à de nombreuses affirmations incorrectes qu’affirment des journalistes scientifiques pour expliquer les fantômes, il paraîtrait que l’attente jouerait un rôle primordial. Partir d’un tel postula est facile et on pourrait se satisfaire de l’argument d’épouvantail suivant « les croyants se font des films et seuls les croyants croient au paranormal ».

Pour donner davantage de poids à cet argument pseudo-explicatif, ce dernier est saupoudré par des études en psychologie anomalistique de Lange, Houran, Wiseman et French sur la suggestion dont les résultats sont contradictoires, largement exagérés par les sceptiques et les « journalistes scientifiques ».

Je rajouterai également qu’aucune étude scientifique relative à la suggestion ne fait état d’hallucinations mais de personnes qui confondent des stimuli ambigus pour du paranormal. En général, les travaux sur la suggestion marchent uniquement lorsque des psychologues ou des magiciens mettent tout en œuvre pour tromper sciemment les volontaires.

Dans les intelligences particulières, en épluchant les archives de la SPR, Delaplace se rend compte que cet argument ne tient pas la route.

Je suis entièrement d’accord avec lui, car j’arrive aux mêmes conclusions dans le cadre de mes recherches sur le terrain et au niveau documentation :

  • La plupart des cas se passent dans des lieux ordinaires ;
  • Les ménages confrontés à ces évènements sont, au départ de ces manifestations, de parfaits incrédules qui peinent à employer les mots « fantômes » et « maison hantée ». Ils se résignent à accepter les évènements lorsqu’ils ont épuisé les explications rationnelles et le « debunking ». Ils appellent alors à l’aide des « spécialistes » afin de comprendre à quoi ils ont affaire.
  • La plupart des enquêteurs de la SPR ne demandent que ça de voir une apparition. Au sens plus large, qui ne voudrait pas constater de tels phénomènes ? Toutefois, dans un nombre non négligeable de cas, les spécialistes arrivent soit après l’événement ou ne constatent rien d’extraordinaire. Attention toutefois, d’autres cas de Hantises notamment de types Poltergeists ont été observés par des enquêteurs de la SPR ou des scientifiques (Inutile de revenir sur des cas emblématiques comme Rosenheim, La Machine…). Concernant les « fantômes », des cas sont extrêmement bien documentés et vus par de multiples témoins comme le « fantôme » de Cheltenham[6]. Le fantôme de Cheltenham a été vu pour la première fois par Rosina Despard. Fille d’un médecin et de formation scientifique, elle a débord cherché à démystifier sans succès le phénomène. Enfin, des cas de manifestations spontanés ont été observés par des chercheurs indépendants.

Au fil du temps, les chercheurs de la SPR ont progressivement délaissé la recherche sur le terrain pour se focaliser sur l’étude du Psi en laboratoire et à raison, puisque les preuves empiriques sur les cognitions anomales se confirment par des méta-analyses[7][8].

De nos jours, les principaux acteurs actuels de l’investigation des hantises sont des amateurs. Même si l’habit ne fait pas le moine, les rares chercheurs académiques sur le sujet regrettent ce glissement et le manque de feed-back entre « professionnels » et « chercheurs amateurs enthousiastes » dans le cadre d’un apport pluridisciplinaire sur le sujet[9].

Quant aux enquêteurs autoproclamés actuels sceptiques comme Radford, Biddle ou encore Nickell, aucun n’a jamais publié la moindre étude scientifique sur le sujet. Paradoxalement, ils se présentent dans les médias comme « des rares enquêteurs scientifiques au monde »…

Quand le fantôme crée le malaise

En soi, voir une apparition n’est pas effrayant. Par contre, ce sont les actions de l’évènement et l’impossibilité que l’apparition soit présente qui va susciter le malaise. Le témoin ressent également de sensations étranges et inhabituelles.

« L’expérience de Mme Butt, autrement dit, illustre à merveille le genre particulier d’étrangeté auquel sont confrontés les témoins d’une apparition. Revenons donc sur le détail de ce qu’elle raconte à Donald West que dit-elle exactement ? Elle dit qu’elle s’est trouvée confrontée à la silhouette d’homme qui aurait pu être un ouvrier mais ne l’était pas (il était trop silencieux), qui aurai pu être un cambrioleur mais ne l’était pas (la police n’a rien trouvé), et finalement aurait pu être un homme, mais en fait ne l’était pas. Autrement dit, la façon dont il se comportait, sa manière de se déplacer, son attitude générale sont trop singulières pour qu’il s’agisse de quoi que ce soit que Mme Butt connaisse ; cette expérience pointe de fait vers autre chose que ce dont elle était familière jusqu’à présent. Finalement, ce qui a effrayé Mme Butt, ce n’est pas tant l’intrusion en tant que telle ouvrier ou cambrioleur, elle semblait décidée à lui faire comprendre qu’il n’avait rien à faire ici mais le fait que ce à quoi elle était confrontée n’était pas ce qu’elle pensait au départ. Même la possibilité qu’il puisse s’agir d’un cambrioleur, donc de quelque chose d’effrayant mais de connu, était moins inquiétante que le sentiment à la fois vague et saisissant d’être confrontée à une situation qui semble familière mais qui se révèle en fait tout à fait étrangère. »

Grégory Delaplace, « Les intelligences particulières », pages 42 et 43.

Grégory Delaplace a bien cerné les caractéristiques d’une apparition.

Je rajouterai que cette forme d’intelligence diffère selon 2 dynamiques principales :

  • Dans certains cas l’événement semble persécuter le ménage.
  • Dans d’autres cas l’évènement fait des actions stupides : Par exemple, dans certains cas d’apparitions, es manifestations semblent absurdes : par exemple, vouloir ouvrir une porte ou une fenêtre qui ne s’ouvre pas. D’autre part : pourquoi des chutes de pierres traversent des murs ? Pourquoi des objets disparaissent et réapparaissent dans un autre endroit ? Pourquoi l’apparition traverse un mur, disparaît subitement ou perd en consistance ?

L’incrédulité de Donald West ?

Nous ne savons toujours ce que sont les « fantômes » et les Poltergeists.

Même si la recherche cerne de mieux en mieux leurs symptômes, il n’y a aucun consensus à leurs sujets.

La principale difficulté à laquelle sont confrontés les enquêteurs du paranormal ouverts et rigoureux c’est d’établir un prévisionnel afin d’être présent au bon moment. À vrai dire, constater un évènement de type apparition ou de type poltergeists relève à la rédaction de cet écrit soit de la chance ou au prix de longues journées d’enquêtes de plusieurs jours, de plusieurs mois dans un même lieu dans l’espoir de collecter une « signature » du phénomène. Il n’est donc pas étonnant que les chasseurs de fantômes fassent chou blanc lorsqu’ils se focalisent sur une nuit d’enquête ou 2 jours d’enquêtes.

L’événement se caractérisant par sa capacité à surprendre, l’enquêteur est souvent pris au dépourvu autant que les témoins pour ramener des preuves tangibles. Soit le matériel n’est pas installé, soit le matériel « plante », soit le matériel n’a capté qu’une partie du phénomène. À cela s’ajoute une communauté très hétéroclite dont les procédés et les croyances divergent. Par exemple :

  • Vous avez des investigateurs qui croient que ce sont des manifestations de morts ;
  • Des enquêteurs qui pensent que ces phénomènes sont liés au PSI ;
  • Des enquêteurs comme moi qui pensent que ces phénomènes sont « autre chose » qu’on ne peut pas réduire à des simples hallucinations ou des erreurs d’interprétations pour les cas les plus documentés dont les sources sont à chercher du côté de la physique, du temps ou des « pensées formes[10]» ;
  • Des enquêteurs « sceptiques » qui partent des biais de confirmations que ces phénomènes n’existent pas et que tous les cas s’expliquent par « la science et la raison »…Surtout la leur.
  • D’anciens croyants qui faisaient n’importe quoi et des pseudosciences qui sont devenus « sceptiques » et qui ont renié leurs anciennes croyances afin d’épouser un nouveau système de pensé ;
  • Des chercheurs notamment des psychologues qui s’intéressent principalement aux comportements humains dans le cadre des phénomènes et aux lieux.

Les enquêteurs de la SPR n’étaient et ne sont toujours pas des crédules. Aussi étonnant que cela puisse paraître certains membres se refusaient à envisager l’existence objective de tels phénomènes, par exemple Frank Podmore qui privilégiait des « hallucinations télépathiques » pour expliquer les fantômes[11].

Ceci dit, les grilles de lectures des enquêteurs ont bien évidemment évolué, réajusté et certaines idées réfutées. Aujourd’hui la plupart des recherches en parapsychologie pointent 3 hypothèses pour expliquer les fantômes et poltergeists :

  • Le Psi ;
  • Des facteurs environnementaux inconnus ;
  • La survie de la conscience ;

Aujourd’hui, il n’existe aucune preuve que les hallucinations télépathiques existent ainsi que les hallucinations collectives. Les causes réductionnistes qui impliquent les visions collectives d’apparitions comme des infections télépathiques sont également vivement contestées par la recherche actuelle au sein de la SPR[12].

Bien que West admît la réalité de la télépathie et s’était attaché à recueillir des preuves de matérialisation de l’ectoplasmie selon Michel Granger, West semblait ne jurer que par des preuves réplicables obtenues sous conditions contrôlées, ce qui est en soi plus que louable.

Par contre, à la lecture du livre de Delaplace, je comprends que la lecture de West au sujet des hantises annonçait une lecture réductionniste de ces phénomènes que l’on retrouve dans la psychologie anomalistique orthodoxe qui prétend réduire ces phénomènes à du connu. À savoir, les classiques :

  • Biais cognitifs ;
  • Hallucinations ;
  • Erreurs d’interprétation ;
  • Fraude ;
  • Impossible car non conforme à nos connaissances scientifiques…

Bref, tout l’arsenal pseudo-sceptique bien connu.

Je suis un grand aficionado de la psychologie mais j’alerte au sujet de la psychologie anomalistique orthodoxe. Si certains diagnostics ou travaux en psychologie anomalistique ne sont pas à remettre en cause et essentiel pour une meilleure compréhension de ces phénomènes, l’arrogance de cette discipline à tout psychologiser est déconcertante ainsi que ces arguments circulaires qui ne cessent de tourner en rond. J’arrêterai là au sujet de la psychologie anomalistique orthodoxe (et non hétérodoxe) car j’ai peur du vide. Quand je pense que Jean-Michel Abrassart préconise avec force que cette discipline bien orthodoxe doit de plus en plus envahir les milieux universitaires pour expliquer le paranormal, j’espère au moins que les heureux diplômés et futurs spécialistes auront une certification MasterClass en onanisme intellectuel.

Pour en revenir à West, je suis sûr que certains confrères ne partageront pas mon analyse. Je ne remets pas en cause la gentillesse et l’accessibilité du chercheur dans cet écrit mais ses biais de confirmations que Delaplace pointe dans son livre. Et se sont ces mêmes biais cavaliers censés expliquer le paranormal par des « sceptiques » qui crées de profondes incompréhensions avec les témoins qui vivent ces phénomènes, qui ne peuvent pas se contenter de « ce n’était que cela » pour tous les cas.

Le triangle de Karpman ou quand l’enquêteur vient perturber le système

Le dernier chapitre du livre m’a incité à entamer une réflexion que je souhaite approfondir et partager. S’Il n’y a aucun consensus au sujet de ce que sont les fantômes et les poltergeists, comment donc esquisser, définir et rendre compte de preuves matérielles d’un événement dont la caractéristique est la fuite ? Nous en sommes toujours à cette problématique à la rédaction de cet écrit. Le simple témoignage n’étant pas recevable d’un point de vue scientifique, même si l’observation est véridique, elle doit être soutenue par des preuves empiriques et le constat de tierces personnes, en bref en faire des faits scientifiques recevables. Certains types de hantises prennent place dans un système. Si dans certains cas le ménage cohabite plutôt bien avec ces évènements, dans certaines dynamiques, il se passe un évènement tellement perturbant que le chez-soi ne devient plus le chez-soi mais un lieu toxique à terme. Il peut également s’agir d’un lieu de travail où l’environnement va se dégrader à cause d’anomalies visuelles ou physiques censées être impossibles et qui vont « bousculer » les témoins.

Les apparitions et les poltergeists ne se laissent pas facilement emmener par la main dans des laboratoires. Ce qui fait leurs singularités c’est justement leurs élusivités, ce que pointe avec justesse l’auteur.

Note : je n’aborderai pas volontairement la problématique des lieux réputés hantés qui correspondent, selon moi à une autre dynamique.

Il n’est pas anodin qu’on parle actuellement du syndrome de la personne hantée associé à un sentiment de persécution et de harcèlement[13][14]. Ce lieu qui, au fil de temps ne va plus devenir un lieu contenant et qui va glisser dans la toxicité et l’inquiétude. Cette toxicité semble se manifester par un ensemble de symptômes : ceux de la personne ou du ménage hanté mais également du lieu hanté. L’association de ces 2 symptômes va générer, selon moi, le syndrome de hantise. Le lieu va ainsi se personnifier, s’affirmer et va faire résonance sur les témoins. Il y a ainsi 2 dynamiques à interroger et à investiguer : l’intelligence particulière des ménages mais également l’intelligence particulière du lieu.

De par ma lecture, les ménages vont interroger les manifestations dont ils sont témoins mais le lieu va également les interroger, les solliciter et les envahir jusqu’à un point où les ménages vont faire une sorte de « burn-out psychique » qui peut allez jusqu’à un point de rupture avec l’habitation, le lieu de travail voir du couple. Lors de la phase de déplacement, j’observe également qu’un triangle de Karpman s’installe : Le Poltergeist ou le fantôme vont prendre le rôle de persécuteur, le ménage de victime et les enquêteurs de « sauveteurs ». Ces syndromes ne sont pas pathologiques mais révèlent plutôt une cognition anomale entre les témoins et le lieu dont certaines manifestations peuvent être objectives (Jott, rapts, coups, apparitions…), et ce sont ces signatures spécifiques que nous tentons d’observer et de collecter en qualité d’enquêteurs dans le cadre d’une démarche empirique.

Syndrome de la hantise au sein d’une habitation classique ou un lieu de travail

 

 

Note : dans les deux cas les 2 types de hantises s’accompagnent toujours d’effets physiques.

Pour que ce syndrome fonctionne, il faut à mon sens que les symptômes du ménage fassent résonance aux symptômes du lieu afin que le système s’instaure. Nous sommes donc dans une dynamique particulière, un cycle particulier entre des êtres humains et un lieu qui va s’incarner petit à petit. Il n’y a donc pas une qu’une intelligence du ménage à investiguer mais une intelligence du lieu. Ces deux symptômes semblent à la fois s’attirer et se répulser dans une sorte d’association symbiotique paradoxale. En fait, pour que le Poltergeist puisse exister dans ce cas précis voir l’apparition, ces évènements semblent avoir besoin d’un carburant pour pouvoir maintenir sa cohérence, et ce carburant, c’est nous, du moins dans la phase 1 avant que le phénomène gagne en autonomie. Ci-dessous, je vais mettre en liens les observations de Delaplace, les miennes avec les 4 phases du modèle de l’information pragmatique du physicien et parapsychologue Walter Von Lucadou afin de tenter de démontrer toute la singularité d’un tel évènement.

 

 

Deux dynamiques de la hantise sont ENVISAGEABLES AU SEIN DES MÉNAGES :

Le modèle classique :

Le modèle MPI cyclique qui se répète et qui peut répondre aux « grandes Hantises » : Le phénomène reste autonome et connaît des phases avec des périodes d’activité et d’inactivité…

Conclusion

« Ce n’était que cela ! » comme pour les témoins, je n’en peux plus d’entendre une telle affirmation pour les cas les plus documentés.

Cela, Delaplace l’a fort bien démontré dans son livre. S’il convient d’avoir l’esprit ouvert face à ces phénomènes et ne pas l’avoir béant face à la bêtise, ne cessons pas d’êtres curieux et de voir plus loin que les règles imposées. Pour tous ceux qui se passionnent au sujet des maisons hantées, ce livre est un incontournable et s’inscrit dans une sociologie anomaliste hétérodoxe. Si l’auteur parle d’intelligences particulières au sujets des ménages et des lieux hantés, les enquêteurs du paranormal et les chercheurs qui se penchent sur la problématique des hantises deviennent à leur tour des personnes particulières et hantées. Moi le premier. Avec le recul, Je ne peux pas m’empêcher de faire une analogie avec le roman de Peter Benchley « les dents de la mer ». Au final, le fantôme et le poltergeists rappellent le requin du roman et leur nature à évoluer sous la surface : certains le voient, d’autres le devinent ou encore, d’autres n’en voient que certaines parties et c’est son imprévisibilité qui en fait à la fois une menace et une fascination. Au final, à l’image du personnage de Quint qui est entraîné dans les profondeurs après avoir harponné l’animal et non pas dévoré comme dans le film, nous tournoyons tous dans les abysses de l’inconnu dans lequel nous entraînent ces événements parce que nous habitons déjà leur monde en étrangers.

Merci Monsieur Delaplace !

Mallory CLEMENT, le 23 février 2022

 

Le livre de Grégory Delaplace est, selon la formule consacrée, disponible dans toutes le bonnes librairies…

 

 

Notes :

[1] https://www.vuesdelesprit.org/presentation/

[2]https://journals.openedition.org/terrain/16604

[3]  Conférence de Mme Despret « Quand les morts inquiètent le rationnel » https://www.youtube.com/watch?v=_Swakhx9bvg

[4] https://www-psychologytoday-com.translate.goog/intl/blog/mysteries-consciousness/202202/are-paranormal-beliefs-result-lazy-thinking?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc

[5] https://psi-encyclopedia.spr.ac.uk/articles/donald-west

[6]https://psi-encyclopedia.spr.ac.uk/articles/cheltenham-ghost 

[7]https://www.researchgate.net/publication/325352351_The_Experimental_Evidence_for_Parapsychological_Phenomena_A_Review

[8] Brian J Williams, Journal of Scientific Exploration, Vol. 35Minding the Matter of Psychokinesis: A Review of Proofand Process-OrientedExperimentalFindingsRelated to Mental Influence on RandomNumberGenerators

[9]Ghosted!: Exploring the Haunting Reality of Paranormal Encounters Livre broché – 20 mai 2022

de Brian Laythe (Author), James Houran (Author), Neil Dagnall (Author)

[10] https://psi-encyclopedia.spr.ac.uk/articles/philip-psychokinesis-experiments

[11]https://psi-encyclopedia.spr.ac.uk/articles/frederic-wh-myers#Phantasms_of_the_Living

[12] https://psi-encyclopedia.spr.ac.uk/articles/theories-about-collective-apparitions

[13]https://www.researchgate.net/publication/344092985_Haunted_people_syndrome_revisited_empirical_parallels_between_subjective_paranormal_episodes_and_group-stalking_accounts

[14]https://www.researchgate.net/publication/338013263_The_Dr_John_Hall_story_a_case_study_in_putative_Haunted_People_Syndrome

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